La torture et la faillite de l’État
Pierre Vidal-Naquet dénonce méthodiquement la torture et les massacres commis avec l’assentiment de l’État français. Historien et citoyen, il se fait témoin, interprète et médiateur – en éditant, en préfaçant, etc. – condamnant les manquements et la faillite de l’État. Il refuse de laisser se construire le mensonge dans le présent, lequel risquerait de devenir une vérité dans le futur.
Dès 1957, il convainc son ami d’enfance Robert Bonnaud de témoigner de son expérience de la guerre d’Algérie. Geneviève Vidal-Naquet dactylographie le texte et le tapuscrit est transmis à Jean-Marie Domenach qui le publie dans Esprit en avril 1957.
En 1958 et 1959, Pierre Vidal-Naquet apporte sa contribution à Témoignages et documents (dont il est rédacteur en chef d’avril à novembre 1959), puis collabore activement à Vérité-Liberté de 1960 à 1962. Ces deux revues, souvent censurées et distribuées « sous le manteau », servent de support pour collecter et établir les faits, informer, témoigner, faire connaître la réalité de la guerre d’Algérie et les manquements de l’État à l’opinion publique.
Son combat ne s’arrête pas avec la fin des hostilités. L’ouvrage décisif, La Raison d’État (Minuit), collecte de documents commentés, publié en 1962, démontre que la torture en Algérie a bien été une affaire d’État.
Suivent plusieurs textes déterminants comme Face à la raison d’État en 1989 (La Découverte) qui rassemble de nombreuses interventions, écrites ou orales, de ces années de guerre.
Juste après la guerre, se distinguant de beaucoup de ses alliés, Pierre Vidal-Naquet dénonce les violences et tortures commises sur ses adversaires d’hier, les anciens de l’OAS – parfois eux-mêmes tortionnaires – ainsi que les harkis.
Ce qu’il combattait, ce n’était pas des hommes, mais bien des actes indignes. Ce qu’il cherche inlassablement, c’est que triomphe le vrai.