Un ghetto dans une caserne
Traités comme arrière-plan ou choisis comme sujet principal, les éléments d’architecture permettent de reconstituer par bribes l’image de la ville garnison, fondée au 19e siècle par Joseph II d’Autriche. Après sa libération, Arthur Goldschmidt la dépeint lui-même de la façon suivante : « Une petite forteresse de forme géométrique, qui a gardé son aspect ancien, entourée de glacis et de fossés. L’endroit conserve toute une série de casernes d’excellente architecture avec des cours entourées de galeries. »
Après l’évacuation des derniers habitants non juifs de Theresienstadt en juillet 1942, les nazis n’auront besoin d’aucun aménagement complémentaire pour isoler les prisonniers juifs de l’extérieur. Organisée autour d’une place centrale de commandement, la ville-forteresse déploie un maillage de rues dénommées selon les axes de A à j et de 1 à 6 pour les parcelles, et de L1 à L6 et de Q1 à Q9 pour les voies, indications que l’on retrouve associées aux noms des personnes internées dans le carnet d’Arthur Goldschmidt.
Les dessins décrivent des casemates, des remblais, des fossés et suggèrent de grandes cours, lieu des rassemblements. Arthur Goldschmidt les traite comme il aborde ses paysages, en gommant les conditions de logement épouvantables et l’insalubrité des lieux. Il livre ainsi de la Petite Forteresse, sinistre prison utilisée par la Gestapo de Prague et située à l’extérieur de l'enceinte du ghetto, sur l’autre rive de l’Elbe, une vision d’une troublante sérénité.