Un camp pour la propagande
Pour contrer les accusations de crime portées par les Alliés, la propagande allemande va présenter Theresienstadt comme un ghetto modèle. Les Juifs allemands sont les premières victimes de cette mascarade. Convaincus par les SS d’arriver dans un lieu de villégiature digne de Marienbad, les Juifs les plus fortunés vont souscrire, en échange de la cession de tous leurs biens, un contrat leur assurant logement, nourriture et soins médicaux. Cette illusion prend évidemment fin dès leur arrivée sur le quai de la gare de Bauschowitz et leur isolement dans une caserne du ghetto, la Schleuse, où tous sont dépossédés du peu qui leur reste.
Pour améliorer l’image extérieure de Theresienstadt, les nazis prennent un certain nombre de mesures à partir du printemps 1943. La « zone de peuplement juive », terme désormais préféré à ghetto, voit ses rues rebaptisées de noms plaisants, l’ouverture d’une banque émettant une monnaie fictive, l’assouplissement des règles concernant la correspondance. La vie culturelle, mise en place avec les premiers internés, va également être utilisée pour propager ce mythe du ghetto modèle.
Ces subterfuges, pour être efficaces, appellent une validation par un organisme indépendant. Le 23 juin 1944, une délégation du Comité international de la Croix-Rouge pénètre dans l’enceinte du ghetto pour une visite minutieusement préparée par les Allemands : 7 500 personnes ont été déportées et le camp a bénéficié « d’embellissements ». Peu après sa visite, le docteur Maurice Rossel du CICR remet un rapport favorable aux autorités allemandes. Quelques semaines plus tard, un film de propagande, auquel est donné après-guerre le titre « Le Führer donne une ville aux Juifs », est réalisé, présentant le ghetto comme un lieu anodin.