À l’issue d’un stage de huit mois au Chantier de la jeunesse d’Artemare, Jean Latreille arrive à Munich dans le cadre du STO en mars 1943. Affecté comme dessinateur à l’usine BMW, il décrit dans ses lettres un quotidien fait de travail, mais également de sorties, d’activités diverses et de camaraderie. Au fil de ses courriers, il paraît s’habituer à la situation et semble même s’épanouir. « Tout va bien », « Ne croyez pas que je suis malheureux », « Je suis réellement très bien », répète-t-il à ses proches tout au long de sa correspondance, quand un poème rédigé le jour de son anniversaire en août 1943 fait émerger l’immense tristesse provoquée par la séparation :
« Ce soir j’ai donc vingt-deux ans
Et je suis exilé. Déjà je souffre
J’attends depuis trop longtemps
Le chagrin sous mes pas ouvre son gouffre »