En octobre 1941, les autorités allemandes choisissent la ville-forteresse de Theresienstadt, à 60 kilomètres de Prague, pour y concentrer les Juifs tchèques du protectorat de Bohême-Moravie, instauré en 1939 suite à l’invasion de la Tchécoslovaquie. Entourée de remparts, Theresienstadt (Terezín en tchèque) est aisément transformable en ghetto. L’évacuation forcée de la population non juive à peine commencée, un premier convoi arrive le 24 novembre 1941.
Un camp pour la propagande
À l’origine camp de rassemblement et de transit avant la déportation vers l’Est, le ghetto de Theresienstatd devient aussi, en janvier 1942, Propagandalager (camp pour la propagande). Il est notamment destiné aux personnes âgées et aux personnalités juives d’Allemagne et d’Autriche – tous ceux dont la disparition dans des « camps de travail à l’Est » paraîtrait suspecte à l’étranger.
La propagande allemande présente Theresienstadt comme un ghetto modèle, en s’appuyant sur des mesures de façade. À partir du printemps 1943, les rues sont ainsi rebaptisées de noms plaisants, une banque émettant une monnaie fictive voit le jour, et les règles concernant la correspondance sont assouplies. La vie culturelle, mise en place avec les premiers internés, est également utilisée afin de propager ce mythe du ghetto modèle.
Mais pour être efficaces, ces subterfuges appellent une validation par un organisme indépendant. Le 23 juin 1944, une délégation du Comité international de la Croix-Rouge pénètre dans l’enceinte du ghetto pour une visite minutieusement préparée par les Allemands : 7 500 personnes ont été déportées et le camp a bénéficié « d’embellissements ». À l’issue de sa visite, le CICR rend un rapport favorable.
Un film de propagande, intitulé après-guerre Le Führer donne une ville aux Juifs, est réalisé quelques semaines plus tard, présentant le ghetto comme un lieu anodin.
L’administration juive du ghetto
Les nazis instaurent une administration désignée et strictement contrôlée par eux. Constituée d’un doyen, le Judenältester, et d’un « Conseil juif » comptant douze personnes, cette administration a une double fonction : appliquer scrupuleusement les instructions des Allemands et tenter d’organiser la vie collective à l’intérieur du ghetto. L’espoir d’être protégé de la déportation vers l’Est entraîne la formation d’une bureaucratie de plus de 17 000 personnes, sur une population d’environ 50 000 internés.
Les déportations depuis Theresienstadt
La déportation domine l’existence du ghetto. Après la concentration des Juifs tchèques, arrivent des Juifs d’Allemagne et d’Autriche, puis des Pays-Bas et du Danemark, plus tard enfin de Slovaquie et de Hongrie.
Le 9 janvier 1942, un premier convoi part de Theresienstadt pour l’Est. L’administration juive du ghetto est chargée d’établir des listes nominatives et de rassembler les internés, conformément aux instructions allemandes fixant le nombre et l’âge des déportés. Ce rôle dans la formation des convois de déportation suscitera de vives polémiques après-guerre.
Plus de soixante convois se succèdent jusqu’en octobre 1944. Sur les 139 654 Juifs internés à Theresienstadt, 33 430 meurent dans le ghetto et 86 934 sont déportés vers « l’Est », où 83 500 sont assassinés, essentiellement à Auschwitz et Treblinka.
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